Le secteur d’utilité publique face au COVID-19
Le secteur d’utilité publique est généralement perçu comme un secteur refuge durant les crises. Cela s’explique par le fait que les sociétés de ce secteur ont une activité reconnue comme essentielle à la vie d’un pays, et que la demande en énergie ne peut être réduite à néant. Il convient cependant d’évaluer la situation de ce secteur au regard des risques actuels : baisse de la demande, impayés, baisse des prix.
Qu’est ce que le secteur d’utilité publique ?
Le secteur d’utilité publique («utilities» en anglais) regroupe des sociétés dont la fonction est d’assurer un service pour de larges populations, tel que l’accès à l’eau potable, à l’électricité ou au gaz. En Europe il regroupe des entreprises comme RWE, EDF, National Grid, Suez Environnement et autres.
Contexte
La propagation du coronavirus depuis la fin du mois de décembre 2019 a réduit l’activité de nombreuses sociétés. Les premières entreprises touchées furent celles exerçant une activité (production ou distribution) en Chine. La diffusion du virus en Europe et en Amérique a rapidement mis à mal l’activité de la plupart des sociétés du globe. Le confinement mis en place dans la majorité des états Européens a entrainé une chute des activités industrielles, qui va se répercuter sur les chiffres de la croissance pour 2020.
Les risqué pour le secteur
- Baisse de la demande
La fermeture des restaurants, bars, lieux de culture, etc., a entraîné une baisse considérable de la consommation d’énergie en Europe. A cela s’est ajoutée la fermeture de nombreux sites industriels tels que les usines de l’industrie automobile. Selon une étude de RTE (Réseau de Transport d’Electricité), la consommation d’électricité en France accuse une baisse de 15% par rapport aux niveaux observés en mars sur les années précédentes.
- Impayés
Beaucoup de sociétés vont connaître des difficultés financières durant et après la période de confinement. L’accumulation des charges et l’impossibilité de générer un chiffre d’affaires pour certaines ne leur permettra pas d’honorer leurs engagements. Les sociétés du secteur d’utilité publique vont donc devoir accompagner leurs clients rencontrant des problèmes de trésorerie. Il est probable que les gouvernements européens demandent explicitement au secteur d’utilité publique de faire preuve de souplesse, et de continuer à fournir un service malgré les retards de paiements. La France a déjà pris des mesures allant dans ce sens à travers la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d’urgence pour faire face à l’épidémie de covid-19. Ainsi EDF s’est engagée, pour les entreprises le nécessitant, à reporter sans pénalité les paiements de factures et à étaler leur paiement sur six mois après la crise.
- Baisse du prix des énergies
Les prix des énergies ont été relativement bas cette année par rapport à la tendance dessinée par les années précédentes. L’hiver doux en Europe explique, notamment, une baisse de la consommation. Un rapport de Copernicus fait état du mois de janvier le plus chaud jamais enregistré en Europe, 3,1°C au-dessus de la moyenne entre 1981 et 2010.
S&P Global Ratings souligne par ailleurs que les bonnes conditions météorologiques ont favorisé la production d’énergies renouvelables, permettant aux barrages hydrauliques et aux éoliennes de produire davantage d’électricité.
Cependant, malgré une atmosphère sous tension qui pèse sur le secteur durant cette crise, celui-ci bénéficie de nombreux soutiens et reste essentiel à l’activité des pays.
Un secteur qui s’en sort mieux que beaucoup d’autres
- Caractère indispensable de ces sociétés
Bien que son activité soit ralentie, le secteur doit toujours répondre à la demande des ménages, des entreprises restées en activité, et des pays étrangers. L’activité de sociétés telles que RWE, EDF, etc. étant essentielle, le secteur devrait se montrer bien plus résistant que la majorité des autres secteurs. D’un pic de consommation d’électricité habituellement aux alentours de 8h (en France), les distributeurs d’électricité ont su rapidement s’adapter à un pic de consommation à 13h durant le confinement.
- Relations étroites avec les Etats et les banques locales
Souvent bien placées pour trouver un soutien des Etats et des banques afin d’assurer la distribution d’énergies, les sociétés du secteur d’utilité publique ne devraient pas rencontrer trop de difficultés à assurer un service constant et à trouver des financements durant et après la période de confinement en Europe.
- Une liquidité accrue
Ces sociétés ont généralement beaucoup de trésorerie, leur permettant de faire face à des délais de paiements de la part de leurs clients. Par ailleurs, la crise actuelle n’est pas une crise bancaire, ainsi les sociétés du secteur ayant un bon « credit rating » ne devraient pas rencontrer de problèmes de financement. C’est pourquoi les agences de notation n’envisagent que très peu de dégradations de notations dans ce secteur.
- Des contrats protégés en avance
Les entreprises du secteur de l’énergie couvrent généralement leurs positions un an à l’avance. Pour cela, elles achètent des contrats courts et des options de vente. Si le prix de l’énergie augmente, elles n’exercent pas leur option et en perdent la prime, en revanche elles vendent leur énergie à un prix plus cher. A l’inverse, si le prix de l’énergie baisse, elles exercent leurs options afin de vendre leur production à un niveau spécifié dans le contrat. Ainsi l’impact de la baisse des prix des énergies en 2020 ne devrait pas être significatif pour le secteur. Pour 2021 en revanche, les positions couvertes représentent actuellement seulement 30% à 50% des contrats selon S&P Global Ratings.
La baisse de la demande, des impayés, et une baisse du prix des énergies, va impacter le secteur d’utilité publique. Malgré les difficultés que le secteur rencontrera, il peut compter sur le soutien des Etats et des banques. Par ailleurs son activité, bien que ralentie, est essentielle et ne peut être réduite à néant. Le secteur d’utilité publique reste un secteur résistant et durable, il bénéficie d’appuis solides et devrait sans aucun doute se montrer résilient à moyen et long terme.
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